Après une année off, pour cause de maladie précédant le départ de la course 2023, me revoici d’attaque pour ma 5ème participation à l’étape du Tour : Nice – Col de la Couillole ! Quel drôle de nom pour une arrivée mais la vue du parcours semble beaucoup moins rigolote… 4600m de dénivelé positif réduit à 138 km seulement, autant dire qu’il n’y aura pas que des côtelettes à déguster. 4 cols dont 3 en 1ère catégorie et aucune vallée, exceptés les 10 premiers km de l’étape en sortie de Nice.
Je semble bien préparé : une semaine d’avril dans les Vosges du Sud avec l’ascension du Ballon d’Alsace dans le vent et la grisaille et la fameuse Planche des Belles Filles sous la pluie, la grêle et la neige par 2°C au sommet. Ça forge le caractère, même si je n’ai pas fait la descente du coup (une voiture blanche est miraculeusement venue me chercher avec la plus belle des Belles Filles).
Mais surtout, le week-end choc Ouest Essonne Athlétisme à Samoëns début mai avec les cols de Joux Plane (2 faces), de l’Encrenaz, de la Ramaz sur 3 jours : un bon entrainement pour mes petits muscles en manque d’effort en montée.
Suite de la préparation avec les mythiques pentes de la Vallée de Chevreuse en participant à quelques
randonnées pour dépasser les 100km de sortie. Pas de douleur, un bon poids de forme (moins de 100 kg) : tout s’annonce pour le mieux.
Et le 9 juin (moins d’1 mois avant le départ), le drame ! « J’ai décidé de dissoudre l’Assemblée Nationale »
annonce un individu en costume à la télévision. Vous me direz : « Mais quel rapport ? » Et vous aurez raison !
Mais 2 jours après, le maire de Nice décide de décaler l’Etape du Tour au samedi 6 juillet (pour laisser les gens circuler librement le dimanche pour aller voter, raison invoquée). Problèmes : 1) Je finis l’école le vendredi, et le trajet jusqu’à Nice dure environ 10 heures, 2) Le logement près de Nice (à Coursegoules, 30 km dans l’arrière-pays Niçois) n’est prévu que le samedi soir, 3) Il me faut des accompagnateurs pour la logistique (me déposer à Nice le matin et me récupérer à l’arrivée le soir). La petite annonce du 9 juin déclenche donc un tas de problématiques à résoudre pour ne pas déclarer forfait une seconde année consécutive. En urgence, nous trouvons un appartement à Nice pour le vendredi soir (pas évident à 4 semaines des vacances) où mes parents pourront également loger. Nous réservons un TGV Paris/Nice pour Céline et Timaé (qui ne pourront pas faire la route avec moi le vendredi) : il restait 4 places dans le dernier TGV de fin de soirée. Et nous prions les dieux de l’Education Nationale pour que je puisse bénéficier d’un départ anticipé le vendredi. La chance est avec nous !!
Pour une fois, je peux remercier l’inspecteur de Dourdan qui souscrit à ma demande et le logement réservé pour la semaine à Coursegoules est finalement vacant le vendredi (nous pourrons y loger). Ouf de soulagement à 3 semaines du départ !
Tout est réglé : l’aventure peut commencer !
Veille du départ – Vendredi 5 juillet – Après une nuit très courte et mouvementée, le réveil sonne à 3 heures du matin. Mes affaires ont été chargées la veille, je pars au milieu de la nuit vers la Côte d’Azur, seul, abandonné de tous, mais avec une pensée pour Céline, Timaé et Thiéfaine qui sont plongés dans de beaux rêves, mes élèves et mes collègues qui ont encore une journée à supporter, mes parents sur la route, le monde entier qui dort, …Personne sur l’A6 jusqu’à Lyon, où les autochtones commencent à se réveiller et viennent empiéter sur mon parcours. Une petite pause vers Macon pour rouvrir un peu les yeux et grignoter une viennoiserie ; toutes les 4 heures, la pause s’impose il parait. Le trafic reste fluide sur l’A7 puis j’entame l’autoroute qui longe la Méditerranée. J’effectue une dernière pause pour déguster un excellent sandwich préparé amoureusement la veille et pour remplir le réservoir d’essence (chacun son énergie), puis je subis le seul embouteillage du parcours à la sortie du péage d’Antibes ; dommage, il reste à peine 15 km. Je reçois un bref coup de fil d’Olivier qui sait que j’empiète sur son domaine de villégiature de St Raphaël puis je raccroche pour pénétrer dans l’agglomération de Nice.
Le village départ se trouve place Masséna, je m’inquiète pour y accéder et trouver une place de stationnement mais je réussis à me garer (avec un créneau réussi du premier coup malgré ce long trajet, tel un pilote d’endurance chevronné) à 4 rues du centre-ville pour une modique somme de 2,40€ les 3 heures ! Je longe le boulevard des Anglais sans leur parler puis j’entre dans le village départ situé dans le jardin Albert 1er (un prince du coin) qui entoure la célèbre place Masséna. Fidèle aux traditions, je consulte le point d’information et le plan pour m’apercevoir que la remise des dossards est au début et la remise du lot est à la fin du parc. Je commence donc par récupérer ma pochette dossard n° 9698 et mon bidon souvenir collector. Puis j’entame la traversée des stands multicolores et variés faisant la promotion de produits plus ou moins en rapport avec le vélo : des gels et des barres (peut-être dopants, je n’ai pas bien regardé), des savons, des vélos (quand même), des Karcher (pour nettoyer son vélo), des boissons isotoniques ou sucrées en poudre ou liquides, des casques, des lunettes, des cuissards, des maillots, des vestes, des chaussettes et chaussures, (peut-être des caleçons, je n’ai pas bien regardé), des montres, des compteurs, des accessoires pour équiper les vélos, la presse régionale (France Bleu Côte d’Azur, Nice Matin), le stand du Tour de France et de la FFC… bref, des stands multicolores et variés (comme annoncé plus haut). Je m’arrête brièvement à certains stands pour observer le matériel, les vêtements, les vélos mais j’ai déjà tout ce qu’il me faut ; je repère mon nom sur le long mur des inscrits (parmi
les 15000 inscrits) ; je prends une photo avec le célèbre diable allemand, je regarde des fous faire du looping sur un vélo, j’observe les anciens vélos d’époque de champions (Indurain, Voeckler, Merckx) puis j’arrive enfin épuisé par cette longue traversée, au stand de remise du lot. Je reçois un grand sac noir costaud avec un gel, une barre et une pochette à accrocher sur le vélo. Fort de cette dotation, je repars à l’inverse, je retraverse tous les stands (je vous passe les détails), récupère une casquette à pois Carrefour (elle me servira dans les cols pour montrer qui est le boss) ; je suis intercepté par une personne du stand des Alpes Maritimes qui me vante les produits éco responsables qui sont vendus à l’office de tourisme et je finis par trouver la sortie de ce dédale publicitaire. Je reçois un SMS de mes parents qui sont arrivés tant bien que mal à la location, je rejoins ma voiture et je pars direction Coursegoules, mon précieux sésame en poche. La route vers Coursegoules n’est effectivement pas si simple, il faut passer de l’autre côté du col de Vence ce qui me fait un entrainement motorisé de ce qui m’attendra le lendemain : 9 km à 7% environ, sur une route étroite formée de multiples lacets et relances. Même la voiture peine, elle manque d’entrainement. Coursegoules est un charmant village dans l’arrière-pays niçois, à flanc de montagne, à 1096m d’altitude environ ; la maison très bien équipée s’étage en multiples terrasses reliées par de nombreux escaliers, ce qui explique la remarque de ma mère concernant l’accès. La vue est splendide sur la forêt et le col de Vence.
La soirée se passe sans encombre avec débarquement de la voiture, installation des valises de chacun,
dégustation d’un plat de pâtes garni de poulet (pas d’apéritif pour pouvoir rouler droit). L’équipe de France tente péniblement de marquer un but tandis que je projette de prendre une douche. En tenue adéquate (sans rien donc), j’ouvre le robinet et là… pas d’eau chaude !!! Après de multiples essais infructueux malgré le déclenchement du disjoncteur prévu à cet effet, je contacte les propriétaires qui me rappellent et m’informent que le chauffe-eau n’a pas dû être remis en marche. Suite à cette information utile, ils m’indiquent comment le mettre en marche forcée, mais le délai avant d’avoir l’eau chaude risque d’être un peu long. Tant pis pour la douche… Je finis ma journée par une préparation minutieuse du vélo et de mon équipement. Le dossard est accroché à mon maillot à l’endroit (pas si facile car le numéro 9698 est étonnamment réversible !), la plaque de cadre est fixée au cintre du guidon (comme son nom ne l’indique pas). Je prévois un sac rempli de la tonne de gels et de barres nécessaires, des manchettes et une veste légère contre le froid éventuel au départ et aux sommets, mes chaussures, mon casque, mes lunettes, de la crème solaire, mes bidons d’eau aromatisée aux sels minéraux, ma pochette avec chambres à air et kit de réparation. Je vérifie mes pneus, mes freins, le passage des vitesses.
Tout est prêt, le réveil est programmé à 5 heures, l’eau est encore trop tiède, je m’allonge en espérant trouver un petit peu de sommeil.
Jour du départ – Samedi 6 juillet – Comme prévu, la nuit n’a pas été de tout repos, mais je suis habitué ; j’en ai profité pour noter quelques souvenirs sur le récit de ce jour passé, réfléchir à ma stratégie pour remporter la course (en crevant tous les pneus de mes adversaires au départ par exemple), envoyer des nutriments dans mes jambes musclées, … Une nuit bien remplie. Je déguste un petit déjeuner copieux de céréales et brioches, jus de fruits et lait chocolaté et enfile mes vêtements de compétition. Je charge mon vélo et mon sac d’affaires dans la voiture après avoir vérifié au moins 20 fois son contenu. Maman est réveillée, elle s’installe pour m’accompagner près de Nice et remonter la voiture à la location. 6h, le planning est respecté : je démarre le contact et c’est part… « Tu mets pas ton portable pour le chemin ? », me demande ma mère. « Non je connais… Mince mon portable !!!!!!!!!!!!!!!! ». Je remonte les escaliers pour récupérer mon appareil qui s’était assoupi sur la table de la cuisine et, cette fois, c’est parti pour la descente du col. Un petit renard nous regarde passer s’interrogeant sur la présence incongrue de touristes à cette heure puis le trajet se déroule sans encombre.
Nous arrivons le long de la promenade des Anglais envahie de cyclistes matinaux, a priori pas tous anglais, qui se dirigent en un flot ininterrompu vers le centre-ville. Nous nous garons à proximité de l’aéroport, non pas pour prendre l’avion mais pour me déposer à environ 5 km du départ (les Anglais font de longues promenades). Je sors mon vélo (important tout de même), enfile mes chaussures ; j’enlève un sous-maillot et mon col car la température est déjà élevée, proche de 25°C alors qu’il est à peine 7h ! Et ce sont les adieux, je pars solitaire sans me retourner (sauf pour faire coucou de la main), abandonné au milieu de vélocipèdes internationaux en exode ; je prends leur sillage, bien à l’abri pour ne pas entamer mes réserves. La mer est belle, la vue est splendide, il fait bon, toutes les conditions sont idéales pour une bonne journée de farniente…
Mon départ est à 8h07 et 30 secondes, j’ai une heure à patienter. Je repère l’entrée du sas 9 (le mien,
forcément), j’admire le paysage du lever de soleil sur la mer Méditerranée puis je pénètre au milieu des
barrières délimitant la cage des numéros 9000. Les premiers concurrents aux dossards moins élevés sont déjà partis : toutes les 7 minutes 30 secondes, un sas entier se met en branle, je suis aux premières loges pour les voir passer du côté gauche du boulevard (le sas n°9 étant situé en premier sur le côté droit du boulevard), en les prévenant que je vais bientôt tous les doubler. J’envoie quelques messages à mes supporters lointains en attendant le décompte final : 20 minutes, 10 minutes, 5 minutes, 3 minutes, 2 minutes, puis j’arrête pour me concentrer sur le départ imminent.
Ça y est, ça roule, mon sas s’ébroue, les pédales s’enclenchent, les roues tournent ; nous traversons des
bandelettes jaunes et noires annonçant l’entrée du sas 0. Il est entouré de messages et de photos dont je n’ai aucun souvenir (la course démarre, mon cerveau est focalisé sur son objectif !). Nous passons la ligne du départ fictif, il y a 5 km de défilé pour sortir de la ville de Nice. Finalement une foule compacte est venue m’encourager, ou peut-être sont-ce les familles des autres concurrents puisque personne ne scande mon prénom ? Les encouragements fusent, le peloton accélère tranquillement ; certains s’arrêtent aux pieds d’un arbre sûrement pour admirer la flore locale. Les gendarmes contrôlent chaque carrefour, nous sommes les vedettes du jour ! Quasiment à la sortie de Nice, une excroissance au sol fait sursauter nos vélos, les puces se déclenchent instantanément (celles du dossard, pas des petites bêtes qui se seraient incrustées subrepticement), un grand panneau noir et blanc semble nous indiquer que c’est le départ réel de l’étape (je suis encore lucide). C’est parti pour de bon !
Nous sortons de l’agglomération via un pont qui surplombe l’autoroute puis nous nous engageons sur une 4 voies avec la montagne en visu. Ce sont les seuls kilomètres de plat de l’étape, il faut en profiter. Un concurrent en profite pour crever, bien fait ! Je m’abrite d’abord derrière un adversaire qui roule raisonnablement puis derrière des pelotons plus ou moins véloces qui se forment au gré des accélérations d’autres pelotons qui doublent. Je me protège du vent, économise mes coups de pédale. Dès la zone urbaine achevée, la route commence à s’élever par un faux plat progressif, le col de Nice non répertorié sur la carte, 5 km de montée tout de même. Je suis un cycliste qui a bonne allure et qui ne perd pas son temps à regarder le paysage, mais au bout de quelques centaines de mètres, il ralentit et s’arrête pour « satisfaire un besoin naturel ». Je continue sur ma lancée mais la pente s’accentue, il va déjà falloir trouver un rythme adéquat pour ne pas s’épuiser. Et les difficultés n’ont officiellement pas commencé. Nous traversons une allée de platanes rectiligne, il n’y a plus de peloton, chacun trouvant le braquet qui lui convient. Au bout de ces quelques kilomètres préliminaires, je franchis le col de Nice à l’Escarène au km 19,4 – altitude 374m (pour rappel, nous sommes partis de la mer, donc altitude 0m ; pour un départ sans difficulté, c’est déjà pas mal…), j’en profite pour absorber un gel au citron, je bois une rasade d’eau pas fraiche et une légère descente récupératrice m’emporte vers la première réelle difficulté du parcours.
Km 20,6 – Col de Braus – 2ème catégorie (1002m – 10km à 6,6% de moyenne)
Nous passons une petite rivière et c’est le départ du col à Touêt-de-l’Escarène par une route sinueuse qui sort abruptement du village. La pente doit avoisiner les 15 % et je me dresse pour la première fois (pas la dernière) sur mes pédales pour simuler une attaque en danseuse (c’est une position de vélo, je n’avais pas prévu de tutu). Mais cela fait mouche et je me rassois assez rapidement pour ne pas impressionner mes adversaires qui s’en contrefichent totalement. Dès les premières maisons dépassées, la vue est époustouflante : la route forme des lacets réguliers à flanc de montagne et la file de vélos déjà présente s’étire en une procession régulière et lancinante. Je rejoins cette transhumance et entame les premiers lacets en conservant un rythme régulier qui s’avère être légèrement plus rapide que mes concurrents proches mais qui n’entame pas mon excellente condition physique : le chemin est encore long ! Je me déporte régulièrement pour admirer la vue en contrebas vers la ville de Nice et pour narguer tous les concurrents qui me suivent. Les virages en épingle me permettent de bénéficier de quelques zones de replat pour relancer d’un coup de pédale alerte dans la ligne droite suivante. La chaleur monte, mais je ne transpire pas trop encore, je gère cette première montée tel un Pogacar à l’affut.
Au détour d’un dernier virage, au milieu de la forêt, la ligne du col se profile, mais la zone est encombrée d’une nuée de cyclistes attroupés devant les tables du premier ravitaillement. Je tente tant bien que mal de me faufiler au milieu de ces énergumènes qui ne se poussent même pas pour me laisser passer. Je contourne les tentes des bénévoles qui servent la meute assoiffée ; je pose mon vélo contre une poubelle, saisit une banane que je dénude aussitôt, remplit un bidon que j’ai bien entamé dans la montée. J’en profite pour faire une petite halte derrière ladite poubelle dans une pissotière installée de manière inopinée mais bien utile au vu de sa fréquentation. Je retrouve mon vélo, l’enfourche en tentant de rejoindre la route sans cogner une jambe, une roue ou un guidon, je remonte mes manches d’un subtil coup de poignet et je repars en direction de la descente opposée (heureusement, je ne me suis pas trompé de sens !). Temps d’ascension : 48’16’’ – 12,5 km/h (5166e/10399)
La descente est plutôt courte, rapide, sans difficulté ; tous les concurrents sont très prudents, chacun freine en avance, prend les virages sans risque et ne double que dans des trajectoires assurées. 27 minutes 50 secondes de récupération bienvenue, j’en profite pour boire, tout en actionnant habilement mes freins. Mais cet intermède parait bien court quand apparait alors la 2ème difficulté du parcours.
Km 45 – Col de Turini – 1ère catégorie (1607m – 20,7km à 5,7% de moyenne)
Le col de Turini s’annonce comme le plus long de l’étape, il va falloir gérer sans entamer les réserves car au sommet, je ne serai pas encore à la moitié du parcours ! A la sortie de Sospel (où je me retiens de chanter « Oh happy days »), la route s’engage rapidement dans les magnifiques gorges du Piaon, le peloton entre en silence dans ce sanctuaire de beauté. Les cliquetis des dérailleurs et des rayons viennent troubler ce calme paisible. La route longe la rivière, nous sommes entourés de magnifiques falaises. Mais le ciel s’assombrit, des nuages menaçants s’amoncèlent au-dessus de nos casques. Est-ce la 1ère fois que je vais affronter la pluie sur une étape du Tour ? Je m’interroge, m’affole… Va-t-il pleuvoir ? Heureusement, nous sommes en montée, ce ne serait pas dangereux pour l’instant. Mais si je passe le col sous des trombes d’eau, qu’en sera-t-il de mon avenir ? Sur ces sombres pensées, les nuages laissent s’échapper les premières gouttes de pluie ! Le peloton redevient bavard : « Il pleut, c’était pas prévu… Si, j’avais vu une annonce d’averse ce matin … » La pluie reste légère ; finalement, elle vient refroidir mon corps qui fonce toujours dans l’ascension. Les pentes restent raisonnables sur cette première partie de col, on avoisine les 5% de moyenne. Je me sens à l’aise, je continue sur mon rythme de croisière, rafraichi par cette douche bienfaisante. Au détour d’un virage, la pente s’accentue légèrement, le paysage s’ouvre devant nous laissant apparaitre la fin de la 1ère partie du col, la pluie cesse alors.
Il n’y aura pas de tempête, d’orage, de cataclysme… Au contraire, la température est idéale, je dépasse le faux col et entre dans le village de Moulinet. Nous sommes au kilomètre 53, le 2ème ravitaillement est annoncé. Il est au milieu de l’ascension, j’hésite entre continuer pour battre le record de vitesse sur la montée ou m’arrêter pour remplir ma gourde et mon estomac. Après une hésitation de 3 millièmes de seconde, je décide de faire une halte (tant pis pour le record). Il y a foule, je contourne la place typique du village en graviers à l’ombre de platanes majestueux qui doivent d’habitude abriter quelques parties de pétanque endiablées. Aujourd’hui, les sportifs sont en vélo, le cochonnet attendra. Je descends quelques marches (à pied) pour rejoindre l’esplanade et pose mon vélo contre un platane assez costaud. Je me dirige vers les tables de ravitaillement où de sympathiques bénévoles me présentent des fruits secs, des bananes, des biscuits apéritifs… Je remplis mes bidons d’eau et de sirop pour avoir un peu de sucre, j’enfourne des bananes et des chips, je prends une barre de céréales et place un gel dans ma poche arrière. La place est ombragée, je ferai bien une plus longue pause, mais le devoir m’appelle. J’envoie un SMS rassurant (Tout est OK) à Céline et à mes parents, je récupère mon vélo qui n’a pas bougé d’un pneu, je remonte les quelques marches (à pied) qui me séparent de la reprise du parcours. Il reste plus de la moitié du col et les pentes y seront plus raides. Je sors du village, ragaillardi par ce repas gargantuesque et je repars sur mon rythme de croisière, le moral est bon, la route m’ouvre son asphalte.
Après un replat de 2-3 kilomètres, la pente dépasse les 6%, les 7% puis les 8% de moyenne. Nous sortons de la forêt, le soleil est réapparu, je me faufile à gauche des concurrents moins rapides. Certains me dépassent eux aussi par la gauche. J’observe les dossards de chacun pour me situer dans la course : les dossards plus élevés sont partis après moi, et inversement. Un groupe de cyclistes verts, sponsorisés par Europcar, me double, je les suis un instant ; mais il vaut mieux garder son rythme, je les laisse filer. Au détour d’un lacet, je les redouble, un des leurs accuse un peu le coup, leur coach décide de ralentir l’allure… Je les reverrai plusieurs fois pendant l’ascension. Cependant, mon vélo commence lui aussi à fatiguer, la dernière vitesse accroche un peu, ma chaine frotte et un bruit régulier le long de ma roue accompagne ma progression. Quand je me dresse en danseuse, ma pédale craque un peu. Ces bruits inquiétants mobilisent un peu mon énergie, un cycliste avisé me dit que mon dérailleur touche mes rayons ; j’essaie d’observer ce qui frotte en maintenant mon cap et mon allure. Je ne vois rien de spécial, mon dérailleur ne touche pas en tout cas. Tel un expert du dépannage, je décide donc de … bah continuer sans rien faire. Les kilomètres s’enchainent, je zigzague entre mes compagnons de route. Au dernier kilomètre, la pente faiblit un peu (comme moi) et je suis bien content de voir enfin le sommet. Il n’y a
pas de ravitaillement au col, je n’envoie pas de SMS (il n’aurait peut-être pas le même contenu), je m’arrête quelques minutes pour boire et prendre mon gel gluant (vraiment gélatineux, il n’y a pas tromperie sur son patronyme), je relève mes manchettes (il ne fait pas si froid que cela) et j’entame la descente vers la vallée suivante. Temps d’ascension : 1h41’58’’ – 12,12 km/h (4808e/10427)
La descente est rapide, technique, sinueuse. Il faut être attentif car la pente est abrupte et nous fait rapidement prendre de la vitesse. Les freins crissent ou couinent selon leur caractère à l’approche des virages. Je serre bien mon guidon, les doigts scotchés aux manettes de frein et le regard rivé sur le point de corde. J’évite quelques trous piégeurs, je maitrise ma monture tout en me laissant porter par le vent frais qui cingle mon visage. A l’entrée d’un virage, un cycliste est à terre, une couverture de survie sur le dos. Cela ne ralentit pas notre progression mais nous rappelle à la prudence. Et au bout de 5 ou 6 kilomètres de descente effrénée, à la suite d’une chicane juste avant l’entrée d’un tunnel, une cinquantaine de cyclistes sont arrêtés par la gendarmerie. Route stoppée, étape neutralisée. Sur le côté gauche, un léger parapet avec le ravin abrupt ; sur le côté droit la montagne à fleur de rocher. Il a dû y avoir un incident, peu de temps avant mon arrivée, car je vois le gendarme qui bloque la route, seulement séparé de quelques rangées de concurrents. Les minutes s’égrènent doucement, les cyclistes arrivent par grappes derrière moi, la file s’agrandit et provoque un embouteillage de plus en plus imposant. L’attente devient longue, stressante, peut-être une dizaine de minutes, je n’ai pas regardé (ni arrêté) mon chrono. Un coup de sifflet retentit, le peloton s’ébroue et repart en se laissant glisser tranquillement. A
mon passage, le gendarme avertit : « Allez-y doucement, y en a déjà 2 dans le ravin ! ». La presse régionale informera le soir même qu’environ 80 chutes ont eu lieu dans cette descente dont 2 cyclistes évacués par hélicoptère…
Le groupe continue son trajet, doucement au début puis la pente ne laisse pas le loisir de trainer, il faut
reprendre les manettes, tenir son guidon, se reconcentrer pour ne pas profiter des buissons épineux en
contrebas. Je détends mes doigts, mon cou, mon dos tant bien que mal entre 2 épingles, tente de soulager mes jambes crispées ; c’est long mais moins fatigant qu’une montée et la vue est splendide ! Nous traversons à toute vitesse le petit village perché de Bollène-Vésubie, je ne m’arrête pas pour prendre un café (de toute façon, je n’en bois pas) ni une bière (de toute façon, je n’en bois pas … souvent) ni un diabolo menthe (ah bah pourquoi pas ? Non, je préserve mes freins) puis nous virons de bord pour remonter la rivière. La vallée de la Vésubie est dévastée, les stigmates des dernières inondations (à peine 1 mois auparavant) sont bien visibles : le torrent a entassé des montagnes de rochers sur les 2 rives, les pelleteuses sont garées dans le lit de la rivière, la route surplombe un fossé de cailloux qui laisse imaginer la force du courant. La reprise du pédalage est compliquée, les muscles sont endoloris par cette longue descente. Heureusement, nous atteignons Roquebillière où nous attend le 3ème ravitaillement (km 82). Les tables sont disposées sur un parking caillouteux, les cyclistes s’y bousculent, je pose mon vélo contre un petit muret entre 2 poubelles surchargées et me faufile pour remplir mes bidons, absorber les habituels fruits secs et biscuits salés. Je récupère 2 gels qui me serviront certainement, il reste quasiment la moitié du dénivelé à subir. La fatigue est présente, mais ce bref arrêt me permet de me soulager et reprendre un peu de vitalité. J’enfourche ma selle adorée, regrette son manque de rembourrage et je repars en direction du col suivant.
Km 92 – Col de la Colmiane (1500m – 7,5 km à 7,1% de moyenne)
Le col de Colmiane est traitre, il ne commence réellement qu’au kilomètre 92, mais il faut remonter la Vésubie sur des pentes de 4 à 5% pendant 10 kilomètres. Personne ne parle, il n’y a plus de peloton pour s’abriter, chacun monte en soufflant et en subissant le summum de la chaleur. Il est autour de midi, il doit faire 30°C, j’ai vraiment chaud pour la 1ère fois de la journée. La moyenne est faible mais j’atteins enfin Saint-Martin de Vésubie. Le village est à flanc de rivière, il a subi aussi les inondations. A la sortie, alors que la route ne semble aller nulle part, nous tournons à gauche pour traverser le torrent sur un pont étroit rescapé de la coulée. Sur la rive opposée, la pente du col est tout de suite visible, les cyclistes qui me précèdent (pas pour longtemps… enfin si peut-être) semblent collés à l’asphalte. La file de vélos ne semble pas progresser, dans quelle galère va- t-on embarquer ?
Effectivement, à la sortie du pont, nous virons à droite, le panneau annonçant le début de l’ascension nous nargue et la pente se cabre à 10% sur un bitume refait à neuf. Ce n’est qu’un petit hors d’œuvre d’une centaine de mètres mais je comprends mieux pourquoi mes prédécesseurs peinaient. Ce petit passage pentu est suivi d’un replat puis la pente atteint à nouveau des pourcentages entre 7 et 8% avec un kilomètre plus compliqué dans la forêt. La route est étroite, elle tourne, je ne me sens pas trop mal mais mon corps me dit de ne pas m’emballer. J’ai toujours le cliquetis de ma roue qui m’accompagne, je n’ai pas eu la présence d’esprit de regarder au ravitaillement, sinon j’aurais facilement régler le problème. Beaucoup de concurrents font des pauses à l’ombre d’un arbre ou d’un caillou, certains s’allongent pour récupérer, le point de rupture est atteint pour ceux qui manquent d’endurance. Je n’en fais pas partie, je chevauche mon fidèle destrier couinant à la conquête des plus hauts sommets en laissant derrière moi un ruisseau de sueur qui fera glisser mes adversaires. Au détour d’un virage, le 253e peut-être, un américain lance à un compatriote : « Eh, you are the first american I’ve met ! » Fortement intéressé par cette discussion impromptue, je regarde leurs dossards effectivement ornés d’un drapeau étoilé, et je me dis que j’ai dû dépasser plus de français. Heureusement que je ne leur ai pas tous parlé… Finalement, l’ascension passe rapidement, la préparation dans la vallée était presque plus épuisante. J’atteins le sommet et appuie mon vélo à côté d’un de ses congénères, contre une barrière métallique grise. Malheureusement, la barrière perd l’équilibre et entraine les vélos dans sa chute.
Tandis que je les remets en place, un individu déguisé (comme moi) apparait et m’interpelle : « What
happened ? » N’ayant pas le courage, l’envie, la lucidité de m’engager dans une explication dans une langue inconnue, je rétorque bravement en haussant les épaules. L’individu, impressionné, repart en maugréant tandis que je rejoins les étals de ravitaillement. Mes bidons se remplissent, j’essaie d’absorber quelques nutriments énergétiques puis je retourne à ma monture. En avant pour la dernière descente de l’étape ! Temps d’ascension : 43’13’’ – 10,3 km/h (4471e / 10634)
Contrairement à la précédente, la descente est aisée, la route bien entretenue avec des passages beaucoup plus roulants qui demandent beaucoup moins de concentration. Tant mieux, cela permet de récupérer, mon vélo se laisse glisser, je n’ai qu’à tourner le guidon ou freiner quelquefois (à vol d’oiseau, cela semble plus dangereux tout de même). 20 km de descente puis une petite vallée et c’est l’entrée dans Saint-Sauveur-sur-Tinée, dernière escale avant l’arrivée. Le ravitaillement est situé dans une charmante place ombragée, la foule est moins dense ; j’accroche mon vélo à une rambarde prévue à cet effet et vient me sustenter pour la dernière fois. Une bénévole remplit mes bidons à ras bord et me propose 1 ou 2 gels. Je lui indique que je vais sûrement avoir besoin de 2 gels, je retourne en courant (à 3 km/h) décrocher mon vélo. Petit regard sur ce charmant village et j’entame ma dernière ascension.
Km 116 – Col de la Couillole (1678m – 15,7km à 7,1% de moyenne)
Si vous cherchez la définition de la régularité, allez gravir le col de la Couillole ! Tous les km entre 6,5 et 8% sans répit, sans replat, sans côte abrupte, un effort constant sur 15 km ! Et c’est long finalement 15 km… J’entame le col motivé, à mon allure de croisière, observant le paysage et mes derniers partenaires. La route est granuleuse, virevolte sans cesse, passe sous des tunnels. Une affiche publicitaire de lunettes vante ses montures qui permettraient de voir comme en plein jour dans l’obscurité de la roche. Leur lecture permet de passer le temps. Car au bout de 5 km de montée, le compte à rebours a commencé : 10 km de l’arrivée, je commence à regarder désespérément mon compteur qui, comme lors des étapes précédentes, a décidé de ne plus dépasser les 10 km/h. Ou alors très rarement suite à un regain de motivation venu de nulle part. Je me remets à observer les dossards pour trouver une occupation : des prénoms divers, des surnoms (le grupetto, le boss… étonnamment dans le même groupe de cyclistes), des nationalités différentes. Je passe d’autres tunnels, ce col n’a pas de point de vue admirable, nous n’avons vu que sur les montagnes. A l’approche du village de Roubion, j’espère y trouver un replat… Mais non, la route continue inlassablement sa progression régulière. Seuls quelques encouragements furtifs permettent de relancer. Panneau 5 km, j’ai trouvé mon équilibre, je double autant que je me fais doubler. 4km, cette fois je transpire pour de bon, mes partenaires peinent également mais tout le monde sent que la fin est proche (dans le bon sens du terme). Panneau des 3 km, je me remets de temps en temps en danseuse mais mes cuisses tirent, il y a un muscle au-dessus du genou qui râle…
Et mon vélo couine toujours, il aimerait qu’on en finisse ! Panneau des 2 km, la pente est plus raide, on est
passé au-dessus des 8 %, le cadeau d’arrivée certainement. Je m’en serai bien passé mais mon courage et mon abnégation dépassent ma fatigue. Flamme rouge (ça veut dire dernier kilomètre pour les ignares qui
découvrent le sport, le vrai !) : enfin, j’entends le speaker au loin dans la montagne, on retrouve des gens
normaux qui sont descendus encourager leur poulain ou leur pouliche au bord du ravin. 500m, 400m, 300m, 200m, mais ils les ont rallongés c’est pas possible ! Et après un ultime virage sur la gauche, la vision tant espérée : l’arche d’arrivée jaune et noire. 100m, 50 m, je passe la ligne d’arrivée dans un sprint inexistant, me battant pour la 4947e place, à 2 pas du podium… Le tapis jaune accompagne mes derniers coups de pédale, je pose un pied à terre, respire un grand bol d’air et me dirige vers une bénévole qui me tend la médaille finisher.
En me la passant au cou, elle me susurre un « Bravo Olivier ! » qui me provoque une petite émotion larmoyante (ou peut-être est-ce un moucheron qui vient de pénétrer dans mon œil ?). Je pense à Céline, à mes parents, à ma famille et quelques amis qui ont peut-être suivi ma progression, content d’avoir réussi cette nouvelle performance. Je récupère une musette avec une bouteille d’eau, une compote (chouette !), du saucisson (re- chouette !) et descends quelques mètres pour échapper à la foule qui m’acclame (ou d’autres peut-être). Temps d’ascension : 1h39’32’’ – 9,35 km/h (4484e/10369)
Le temps s’est couvert, je remets mes manchettes, mon col, ma veste et tente d’avertir mes parents de mon arrivée. Mais, pas de réseau ! Forcément, rien à l’horizon à part une nuée de gens bariolés. Il faut donc reposer mon fessier sur cette maudite selle et attaquer la descente vers le village arrivée situé à Beuil (environ 6 km de descente). Je laisse mon vélo se débrouiller, mes roues rouler, mon guidon guider, mes freins freiner, je n’ai plus de force pour diriger ni trouver du vocabulaire. Mauvaise surprise, il y a un faux plat montant pour rejoindre le centre du village, j’y parviens aisément au milieu des centaines de voitures d’accompagnants ou participants garées n’importe comment. Un gendarme tente de faire la circulation au seul rond-point du coin. Il hurle aux cyclistes de faire un détour vers une voie à travers champ pour rejoindre le ravitaillement, tandis que les voitures s’entassent vers l’unique descente autorisée. Des centaines voire des milliers de voitures, de piétons, de cyclistes se rencontrent au rond-point de Beuil, village paisible de 553 habitants. Je m’arrête à la sortie du rond-point et ressort mon téléphone enfoui sous ma veste, empêtrée dans ma musette. Je m’aperçois qu’il y a plusieurs messages de mes parents qui se sont inquiétés de ma progression stoppée dans la fin du col (le GPS
n’avait plus de réseau…). Je les rassure et leur annonce mon arrivée prochaine. Ils m’attendent tout en bas du col (l’accès au sommet étant quasi impossible), il me reste environ 20 km de descente pour les rejoindre en traversant les gorges du Cians. Je laisse la Pasta Party, il y a une queue gigantesque pour accéder au ravitaillement, et continue ma route vers la sortie du village. Au dernier croisement, un 2ème gendarme tente de gérer le flux ininterrompu de voitures qui veulent descendre sur une voie encombrée par toutes les autres en stationnement aléatoire. Il refuse de laisser passer les cyclistes qui, comme moi, n’ont qu’une envie : rejoindre leur voiture ou leurs accompagnateurs. La colère gronde, une émeute se profile puis, effrontément la meute de cyclistes (et moi) profitons d’une voiture bloquée pour démarrer notre descente. Pendant 2 ou 3 kilomètres, c’est une file interminable de voitures garées le long de la falaise ou du ravin, sur des parkings improvisés. Mes parents ont bien fait de ne pas monter jusqu’ici ! Puis je traverse à toute trombe les magnifiques gorges rougeoyantes du Cians. C’est splendide, je suis entouré de montagnes d’ocre dans un décor du Colorado.
Malheureusement, de grosses gouttes de pluie font leur apparition, la prudence est de mise et je ne traine pas pour continuer ma route. La pente s’adoucit et je parviens enfin à un rond-point annonciateur de la fin des gorges. Mes parents m’attendent sagement et impatiemment, quel bonheur de retrouver sa famille (MERCI !), il est temps de se changer. Un bouchon monstre s’est formé. Rapidement, nous entamons un nouveau périple vers Antibes pour récupérer Céline et Timaé à la gare TGV.
Peu de temps pour digérer mais globalement, ce fut une étape bien gérée, je ne suis pas épuisé, un peu plus de rapidité m’aurait peut-être fait exploser sur la fin. Grand regret de n’avoir vu personne sur le parcours ou à l’arrivée, mais les circonstances ne le permettaient pas. Et nous sommes arrivés à la minute près à l’arrivée du TGV à Antibes après 2 heures de route dans les montagnes.
Les vacances peuvent commencer, vivement l’annonce de la prochaine Etape du Tour !!!
Temps réel : 138 km (4600m de dénivelé positif) en 8h24’28’’ – 4947e / 10595 (548e / 1190 dans la catégorie M5)